Droit National VS Droit International
Vous rappelez-vous des Ordonnances Macron de septembre 2017 ?
Une des réformes mise en place au début du premier quinquennat du Président Emmanuel MACRON…
Pour rappel, on parle d’Ordonnance (article 38 de la Constitution de 1958) quand le gouvernement prend une mesure relevant normalement du domaine de la loi. Bien entendu, un tel procédé ne peut se faire qu’avec l’autorisation du Parlement. C’est donc par ce biais qu’ont été créés des barèmes d’indemnisation pour perte d’emploi (avec un seuil et un plafond en fonction de l’ancienneté) en cas de perte d’emploi injustifiée (Ordonnance n° 2017-1387 du 22 septembre 2017).
Sur le plan national
lesdits barèmes d’indemnisation ont été validés par le Conseil d’État (CE, Juge des référés, 7 décembre 2017, n° 415243), le Conseil Constitutionnel (décision n° 2018-761 DC du 21 mars 2018) puis la Cour de cassation (2 avis de l’Assemblée plénière de la Cour du 17 juillet 2019 n° 19-70.010 et n° 19-70.011, plus récemment 2 arrêts de la Chambre sociale du 11 mai 2022, n° 21-14.490 et 21-15.247).
À en croire la position nationale, il n’existe aucun doute sérieux sur la légalité des barèmes dès lors qu’ils permettent d’indemniser correctement un licenciement injustifié.
La position internationale
C’est tout autre : le Comité Européen des Droits Sociaux (CEDS) s’est prononcé le 23 mars dernier considérant que les plafonds prévus par les barèmes MACRON suite à perte d’emploi « ne sont pas suffisamment élevés pour réparer le préjudice subi par la victime et être dissuasifs pour l’employeur. En outre le juge ne dispose que d’une marge de manœuvre étroite dans l’examen des circonstances individuelles des licenciements injustifiés. Pour cette raison, le préjudice réel subi par le salarié en question lié aux circonstances individuelles de l’affaire peut être négligé et, par conséquent, ne pas être réparé ». Il en conclut une violation de l’article 24b de la Charte sociale européenne (CEDS, 23 mars 2022, CGT-FO c. France n° 160/2018 et CGT c. France n° 171/2018 – décision notifiée le 25 mai 2022 et publiée le 26 septembre 2022).
Il est à noter que le CEDS n’a fait que confirmer la position qu’il avait déjà prise à l’encontre des barèmes finlandais (CEDS, 8 septembre 2016, n° 106/2014) et italien (CEDS, 11 septembre 2019, n° 158/2017) qui sont nettement supérieurs aux plafonds français (24 mois en Finlande, 36 mois en Italie et entre 1 et 20 mois en France).
Peut-on s’attendre à une sanction de la France concernant ladite violation ?
À priori, aucune sanction n’est prévue.
Les décisions du CEDS ne produisent aucun effet contraignant à l’égard des juridictions françaises… Il ne s’agit que de recommandations adressées au gouvernement national le laissant libre (lui comme le législateur) de modifier le droit national en tenant compte de la position du CEDS.
Conclusion
La résistance nationale est claire. Les barèmes MACRON suite à licenciement ont semble-t-il encore de beaux jours devant eux…